Olivier Nasti
Le Chambard - Kaysersberg
Une affaire de famille
« JE NE SUIS PAS DEVENU CUISINIER PAR HASARD »
Le chef a beau avoir regardé sa mère et sa grand-mère cuisiner le dimanche pendant toute son enfance, cela ne l’a pas tant inspiré que le fait d’avoir grandi dans une boulangerie. Pendant toute son enfance, passée à Belfort, Olivier est certain que plus tard, il sera boulanger. D’ailleurs, le premier plat qu’il prépare est une charlotte aux framboises. Ou du moins est-ce le premier plat qu’il essaie de préparer. « Je ne savais pas incorporer la gélatine. J’étais pressé et je devais retrouver des amis. Ça n’a jamais tenu ! » se souvient-il.
Mais pourquoi alors est-il devenu cuisinier ? Si ce n’est par hasard, ce serait donc par destin. Alors qu’il se destine toujours à devenir boulanger, un poste se libère à l’Hostellerie du Château Servin. A l’époque, le restaurant est décoré de deux étoiles au Michelin. Le jeune homme tente sa chance. Inutile de dire qu’il obtient la place. C’est là qu’il débute son apprentissage.
Mais attention, n’allez pas lui parler d’école hôtelière. Olivier Nasti a appris à cuisiner « sur le tas », à son arrivée dans l’hôtel-restaurant de Belfort. À ses débuts, il est accompagné par le chef Dominique Mathy, avec lequel il apprend les bases du métier de cuisinier.
Fort de cette première expérience dans un établissement étoilé, Olivier quitte Belfort et la Franche-Comté pour voyager. Sa découverte des cuisines le mène sur la Côte d’Azur, au Luxembourg, en Suisse au Lausanne Palace, puis au Royaume-Uni où il trouve une place dans un restaurant étoilé du sud de Londres. Il y débute en tant que commis de cuisine, avant de gravir les échelons, passant progressivement chef de partie, puis chef. Il finit malgré tout par se rediriger vers la France, et plus précisément vers l’Alsace.
C’est dans les cuisines de Jean-Yves Schillinger qu’il fait son grand retour en 1989, devenant le second de ce chef doublement étoilé. Après quoi il se tourne vers Illhaeusern et son Auberge de l’Ill. Il passe deux ans dans le trois étoiles de la famille Haeberlin. Du Haut-Rhin, il part en Bretagne, à Cancale, pour découvrir le travail avec Olivier Roellinger à la Maison de Bricourt, avant de revenir en Alsace, où il ouvre sa première entreprise.
On est alors en 1993. Olivier Nasti vient d’apprendre qu’une grange nichée au cœur du vignoble alsacien, à Eguisheim, est à vendre. Il demande de l’aide à son frère Emmanuel, architecte, pour restaurer la grange et la transformer en hôtel. Celui-ci se joint à lui et abandonne bien vite son métier pour se lancer aussi dans la restauration et devenir sommelier. C’est ainsi que les deux frères fondent le Caveau d’Eguisheim, qu’ils dirigeront ensemble pendant sept ans.
A cette période, ils ouvrent aussi l’Hostellerie du château, 12 chambres d’hôtes à Eguisheim. C’est pendant ces quelques années passées à la tête du >Caveau d’Eguisheim qu’Olivier obtient ses premières reconnaissances par le milieu professionnel. En 1995, il est nommé meilleur espoir national et maître cuisinier de France en 1996.
En 2000, Olivier et Emmanuel Nasti revendent le Caveau d’Eguisheim pour reprendre le Chambard, à Kayersberg. « C’était une maison très reconnue, qui avait une étoile depuis plus de trente ans. Elle a connu trois propriétaires différents, qui ont tous été étoilés, donc c’est une maison qui avait déjà un nom », tient à rappeler son chef. Les deux frères entreprennent des travaux pour agrandir l’hôtel. De 20 chambres trois étoiles, le Chambard passe à 32 chambres décorées de quatre étoiles.
Pour gérer l’hôtel restaurant, les frères Nasti ont misé sur la famille. A la réception de l’hôtel, Corinne, l’épouse d’Emmanuel. A la Winstub, le bistrot du Chambard, Patricia, la femme d’Olivier. En tout, ce sont 45 employés qui travaillent au Chambard.
« Ce que j’aime mettre à ma carte, ce sont des produits que je peux trouver autour de chez moi. » Les Escargots sont à l’honneur… Et pour terminer le repas, il recommande son feuille à feuille à la vanille bourbon, un millefeuille accompagné d’un blanc-manger à la vanille, qui ne se déconstruit pas lorsqu’on le déguste.
Nommé meilleur ouvrier de France en 2007, Olivier Nasti obtient aussi en 2009 le Gault Millau d’or – trophée Villeroy et Boch. Un prix qui vient récompenser la modernité avec laquelle le chef aborde la cuisine de sa région. Soucieux de voir cet esprit se perpétuer, Olivier s’implique dans diverses manifestations, comme la sélection régionale pour le concours de meilleur ouvrier de France, le concours du meilleur foie gras d’Alsace, le trophée Epicure ou le trophée Paul Haeberlin. C’est drôle, à force de parler de la famille Nasti, on pensait justement à cette autre dynastie de la cuisine alsacienne.